Plotter station
Rapport d'activité
Rappel du contexte
Open Source Publishing (OSP) est un collectif de designers qui décrit son objectif comme étant de “diffuser la culture du Libre et de l’Open Source à Bruxelles et à l’international”, nous œuvrons à la réalisation de ces objectifs à travers trois axes : pédagogie, recherche et design graphique. Nous avons développé depuis 2006 une pratique mixte de recherche artistique et de workshops, mais beaucoup de nos projets restaient jusqu’alors des commandes. En tant que collectif, nous avons ressenti sur les dernières années le désir d’accroître le rôle de la recherche et des projets auto-initiés. L’aide à la conception, a été pour nous l’occasion de mettre en route le développement de la “plotter station”, station de traçage, un projet qui nous fournit un contexte pour déplier l’expérimentation artistique, les questions esthétiques liées à nos pratiques et performer l’impression.
Le projet se dessine en une suite d’événements permettant de sensibiliser et d’accueillir un public — tels que des ateliers, résidences et performances — en partageant les connaissances et en donnant accès à nos outils, à la fois matériels et logiciels.
Un plotter, ou traceur, est une machine à dessiner mécanique utilisant des stylos “communs”. Développée dans les années 70 et 80 elle est utilisée à l’époque pour des impressions grand format de plans d’architecture, de dessins DAO ou de graphiques d’entreprise. Elles sont contrôlées par un ordinateur au moyen d’un langage d’une simplicité séduisante, le HPGL, qui décrit le mouvement des stylos. Bien que les traceurs de découpe contemporains soient basés sur ces mêmes machines, la lenteur, le coût d’utilisation et les imprimantes à jet d’encre grand format ont rendu ces premiers traceurs obsolètes. Mais c’est justement cette lenteur et ce mouvement performatif qui les rendent empathiques. Alors que leur simplicité permet une appropriation facile, leur mouvement non optimisé et répétitif donne un aperçu des commandes qu’ils reçoivent de l’ordinateur. Comme un traceur dessine avec un stylo, il dessine des lignes plutôt que des aplats, la forme de ces lignes est influencée par le stylo, son épaisseur, son angle et l’encre. Les traceurs et leurs gestuelles produisent aussi en ensemble de sons, autres voix potentielles pour entrer en dialogue. Pour toutes ces raisons ce sont d’excellents compagnons pour nos recherches.
La plotter station, station de traçage, est un projet multiple qui vise a consolider et ouvrir la pratique de design par plotter d’OSP. Avec plus de 10 ans d’experiences, d’artisanat et de pédagogie autour des plotters, OSP a accumulé des savoirs faires singuliers et marginaux, qui méritent d’être partagés. La plotter station entend être une voix qui questionne les normes, la résilience, en invitant les designers à prendre leurs outils en main.
Évolution de la phase de conception
Adaptations de la proposition initiale
Scénographie: Initialement prévu dans la première version du dossier comme un projet d’art numérique en phase de conception (la plotter station était présentée comme une installation), la proposition a été redirigée par la commission vers une demande d’aide aux événements Dans cet élan, notre énergie s’est concentrée sur les aspects curatoriaux, l’organisation d’évenements et la plateforme web afin de rendre la suite du projet plus suivit et solide. Ainsi la site prend désormais une place plus centrale, c’est l’installation et le point de départ du programme, rassemblant documentation, historique et annonces des événements et liens réseaux.
La proposition d’une table ronde avec d’autres artisans et experts, initialement prévu dans le but de mettre en jeu une experience parallèle à celle des membres d’OSP, est une étape que nous avons préféré reporter car elle gagnera à être amplifiée par un réseaux de contacts plus large. Ce réseaux est en court de création. Nous avons rencontré plusieurs intervenant·es à l’occasion des 2 premiers évenements publics organisés dans le cadre de premier chapitre et de la communication qui a circulé autour. Mais la liste des invité·es projetée dans l’agenda prototype des workshops et print parties de l’automne 2024 au printemps 2025, nous permettra de vraiment activer des rencontres croisant plusieurs type de pratiques.
Récit des événements
Acceuil et accessibilité
Motivé·es par notre pratique du collectif, nous avons travaillé aux conditions nous permettant d’accueillir d’autres personnes qui utiliseraient nos traceurs pour leur propre travaux (illustrateur·ices, auteur·ices, designers, typographes, hackers, et plein d’autres), d’offrir des résidences et d’organiser des ateliers pour un public plus large, afin de disséminer davantage notre expérience et nos connaissances dans le paysage bruxellois, belge et européen. Une technologie devient politique par son usage. Il est clair qu’une dimension de ce projet concerne non seulement les outils mais aussi la curation et l’accessibilité de certaines pratiques, d’où la nécessité d’être invitant·es, de guider et faire avec les non-initié·es. Les sources du projet entrelacent des voies sociales, politiques, économiques et pédagogiques. Dans cette idée, deux événements ouverts ont été réalisés.
Une Plotter party à pris place le samedi 4 Mai 2024, dans les studios d’OSP, lors du Meyboom festival. La présentation et performance ont eu lieu à un moment choisit de visibilité, à l’occasion d’Atelier in beeld, week-end d’ateliers ouverts pour les artistes visuels de Flandre et de Bruxelles auquel a participé notre plateau Meyboom Artist Run Spaces La print party a donné lieu à un moment d’échange entre les passionné·es et tous les curieux·ses du public, venu·es visiter les ateliers. Cette plotter party a été organisée en collaboration avec des étudiant·es et membres du département XPUB , un cours d’édition expérimentale conduit au Piet Zwart Institut de Rotterdam. En effet, une équipe de la formation s’est récemment intéressée aux plotters comme une dynamique de technologies (non) obsolètes, une attitude performative et une méthode de collaboration. Pendant l’évènement, nous avons présenté des expériences, des outils et des publications liés aux plotters: explorant les comportements des plotters, les graphiques vectoriels, les illustrations, la typographie et la mise en page. La soirée était annoncée comme un moment d’échange entre les passionnés de traceurs et toute personne curieuse d’explorer les cultures du traçage . Pendant la soirée, nous avons aussi introduit et arpenté le langage HPGL et partagé des pratiques de travail intime avec les outils, tout en utilisant des logiciels libres et open source. De part son inclusion dans les portes ouvertes du Meyboom artist run spaces, l’évènement a permis à de faire découvrir les plotters à de nombreux·ses amateur·ices. Les étudiant·es d’XPUB ont partagé leurs projets de recherches et OSP a fait une présentation de sa récente collaboration avec iMAL pour l’exposition Naturarchy.
Le workshop Cobbled-paths, premier workshop programmé de la plotter station, à pris place le 8 Juin 2024, dans les studios d’OSP. Pour ce premier atelier, OSP invitait à une aventure quadrillée et sinueuse de création d’affiches collectives tracées à l’aide d’un outil bricolé appelé Cobbled Paths.
Cobbled Paths est une interface web qui rassemble plusieurs outils pour permettre une collaboration en direct autour des dessins tracés au stylo à travers l’écriture collective d’art Ascii sur etherpads (éditeur de texte libre en ligne fonctionnant en mode collaboratif et en temps réel). Ce premier workshop fut l’occasion de travailler une journée entière, plus en intimité que l’ouverture de la plotter party. Le workshop ressembla un petit nombre de participant·es mais de réseaux diverses et de status variés: Luna Petit, sérigraphe pratiquant l’édition queer basée à Bruxelles, Victor Hoffner, membre du réseaux de publication alternatives pre-post-print venu de Strasbourg, Teilo Jaubert un·e étudiant·e de l’école de recherche graphique, Adèle Grégoire, artiste travaillant à l’erg en contact avec les machines, Ainsi que 3 membres d’OSP.
Après une présentation et discussion autour des outils et intérêts de chacun·es, la journée nous a mené vers l’écriture et le dessin des 2 supports collectifs, une série de posters, schématisant les différents réseaux, collectifs et institutions auxquelles chacun·e de nous est connecté·es. Puis nous avons travailler à plusieurs mains à la composition d’une carte A5 recto verso rassemblant lettrage, dessins en séparation de couches couleurs et motifs. L’échange fut bi-directionnel. Les invitæs ont amené leur propre sensibilité et artisanat via le partage de techniques et d’outils spécifiques. L’élaboration s’est faite par assemblage de différents duo de compétences, avec une allure joyeuse et vers des tracés qui évoque aussi bien la tapisserie que questionne l’impression tramée offset, comme en les décomposant via une autre mécanique et à travers le digital.
Artisanat et technique
Il nous semble fondamental de faire en sorte que le versant technique de la station de traçage reste à la fois subversif et soit autorisé à devenir plus précis. Une technologie devient politique par son usage. C’est cette volonté qu’OSP a souvent cristallisé dans la phrase “Les pratiques façonnent les outils, les outils façonnent les pratiques”. Expliciter tous les processus comme le fait volontairement OSP, n’est pas un abaissement de la poétique mais l’inverse, en la rendant sensible par son côté fonctionnel, en la dés-individualisant et en la rendant plus difficile à capturer par le marché. D’où la nécessité pour ce projet d’être financé par le public.
Pour rendre la station et les langages plus accessibles, nous avons installé un serveur sur un Raspberry PI. La fonction principale de ce serveur est d’héberger une interface qui permet d’envoyer du langage HPGL au traceur sans avoir besoin d’installer un logiciel ; les visiteur·euses peuvent ainsi contrôler le traceur à travers leur navigateur web. Ils peuvent saisir le code HPGL, prévisualiser le dessin et l’envoyer directement au traceur. L’interface supporte plusieurs modes d’écriture : dans un champ de texte normal, sur un etherpad pour permettre des dessins collectifs et enfin à travers la programmation visuelle.
Pour la print party avec l’équipe d’XPUB, nous avons dessiné une affiche en collaboration avec les étudiants à travers l’interface du traceur en mode « etherpad ». Pendant plusieurs semaines, les étudiants et les membres de l’OSP ont travaillé à tour de rôle sur le HPGL de l’affiche. Le résultat a été tracé à Bruxelles et à Rotterdam. Les copies physiques ont été distribuées à Bruxelles. Un scan a été utilisé pour la communication en ligne sur le site web de la station de traçage et sur les médias sociaux.
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L’outil Cobbled-paths met bout à bout plusieurs pièces logiciels. En entrée, un document d’écriture partagé ou les participant·es sont invitæs à composer en ASCII art. Les éléments texte sont ensuite interprêtés par svgbob, un outil qui converti le texte en traçés svg. La composition svg peut enfin être traduite en hpgl pour un envoi en direct vers le plotter. FIglet - un programme de conversion, qui permet de créer de grandes lettres à partir d’un texte brut - peut aussi être utilisé en amont pour aller vers un travail de lettrage plus spécifique. Cobbled paths permet donc de connecter dans une même interface et de rendre visible ces différentes transformations. Le nom Cobbled paths signifiant "chemins pavés" fait référence aux chemins entre texte monochasse et lignes tracées, des chemins faits à partir d’une grille très restrictive, morcelés puis lissés, comme de multiples blocs de pierre formant une piste sinueuse vers le tracés du bras de la machine. Cette métaphore des chemins pavés rappele aussi la perméabilité entre le discret et le continu du paradigme digital.
Ces outils et méthodes font maintenant partie de l’éventail de possibilité de la plotter station.
Site web, communication et documentation
Le site web de la plotter station a plusieurs fonctions. Outre celui de canal de communication, il donne un aperçu des outils disponibles, des événements et des recherches. La documentation permet aussi aux futurs utilisateur·ices, aux participant·es des ateliers ou aux résident·es de se familiariser avec les outils et de préparer leur visite. Le site pourrait, dans une phase de production ultérieure, devenir l’espace de publication des recherches et des travaux réalisés par et dans la station.
Les machines d’OSP y ont été cataloguées collectivement sous forme de tableau de méta-données, en plus de l’archivage de leur manuel officiel (parfois difficile à trouver). Un travail d’image à également eu lieu en retrouvant des publicités officielles de ses machines lors de leurs années de parutions, celles-ci on été croisé à une série de photos analogiques prises par les membres d’OSP dans le décor de leur studio contemporain, ce qui permet de troubler l’appartenance temporelle des machines.
Un agenda des évènements est également tenu à jour sur le site, ainsi que les images de communication venant exemplifier les thématiques singulières des évènements.
Developpée en même temps que ces deux derniers chantier, la mise en forme du site web lui même s’inspire de paradigmes liés au plotter:
- La typographie est single-line, c’est-à-dire suivant un simple tracé plutôt qu’un contour et remplissage.
- Les pages Catalogue et Agenda scrollent horizontalement, imitant un mouvement similaire à celui du bras du plotter qui se déplace sur une feuille.
- Le menu réplique la sélection de stylos de la machine.
- Les pattern "hatching" en fond reprennent ses trames par défaut.
Collecte et archivage de travaux dessinés au traceur
Le dessin au traceur ne se résume pas à de simples lignes. La variété des traits, selon les outils utilisés, est vaste : plumes calligraphiques, craies, encres végétales. Les possibilités d’aplats, de remplissage et de tramage sont également infinies. Dans cette idée, une page bibliothèque à été ajoutée au site web, retraçant les experiences clé d’OSP au plotter. Nous désirons étendre cette catégorie en dehors des publications d’OSP, et être plus généreux·ses sur les images.
Code de conduite
Comme nous avons l’intention d’accueillir un public plus large, nous estimons qu’il est important de fournir un espace sûr et accueillant, avec des procédures claires pour gérer les éventuels moments de tension, de désaccord ou de conflit. Dans cette idée, une page de code de conduite à été écrite. Celle-ci s’inspire de plusieurs références collectées à travers la pratique de collectif des différents membres d’OSP, notamment: Hackers & Designers, Varia, Constant, Meyboom Artist Run Spaces, etc.
Programme prototype de recherche et d’activités
Pendant cette phase de conception, nous avons pris le temps de définir un programme au plus long court. Une programmation en plusieurs chapitres à été prototypée à travers des discussions et moments de mise en commun. Il semble important de dire que cette étape, au delà de l’élaboration d’un agenda, nous a demandé
- d’explicité notre intérêt pour la recherche sur les plotter à travers plusieurs thématiques,
- ainsi que de mettre en place un réseaux de potentiel collaborateur·ice.s.
La proposition s’articule en une série de quatre premiers workshops et se termine par une présentation publique en plotter print party. Le programme des workshops ici présentés et à venir dans un second temps suit un découpage en quatre axes et est présenté en détail dans notre dossier de demande d’aide aux événements remis en juin dernier.
- À travers les langues et les rythmes: Echo avec iMAL, Motifs en cascades avec trois invitæs.
- Par le geste: Single line fonts relationship avec L’isdaT à Toulouse, Vector remix avec cinq invitæs.
- Rythme et sons, en collaboration avec Overtoon
- Vers le multiple (à venir)
- Ainsi qu’une Print party
Projets réalisés en réseaux
Nous sommes enthousiasmés par le potentiel des traceurs à stylos en tant que machines de production, outils pédagogiques et portes d’entrée dans notre pratique. C’est pourquoi nous les avons placés au centre (symbolique) de la proposition.
Dans l’élan de la mise en place de la plotter station deux autres collaborations ont eu lieu.
Naturarchy avec iMal Nous avons été sollicité par l’iMal pour renouveler une partie de leur identité graphique à travers l’identité de l’exposition NaturArchy: Towards a Natural Contract qui a pris place du 25.05 au 29.09.2024. L’exposition étant composée de collaborations art/science sur le thème de la nature, nous avons commencé avec l’intention d’expérimenter avec les traceurs à plume et des encres biologiques. Les encres biologiques faisaient déjà partie de l’une de nos expérience précédente dans le cadre d’une collaboration en 2018 avec María Boto Ordonez, une chercheuse à la KASK et au Conservatorium. Cette collaboration à mené sur un article de recherche qui documente le project et dont on peut retrouver le lien dans la bibliothèque de la plotter station
Des expérimentations autour de l’outil Cobbled-paths ont précédé le workshop dans le studio d’OSP. Avec l’idée que la plotter station sera le projet idéale pour tester cette idée, les membres d’OSP ont pré-emptivement organisé un workshop Cobbled-Paths à l’ISBA de Besançon sur invitation de l’école, avec les étudiant·es de typographie. Ce premier workshop Cobbled-paths à permit de poursuivre le development de l’outil et d’en préciser les possibilités.
Suite
Le programme de la suite est présenté dans notre dossier de demande de soutien aux événements remis en juin dernier. Il s’articule en une série de quatre premiers workshops et se termine par une présentation publique au sein de nos nouveaux ateliers, rue Lambert Crickx 17, plateau rassemblant les artistes du Meyboom Artists Run Spaces.
Le programme des workshops au long court suit un découpage en quatre axes.
- À travers les langues et les rythmes
- Par le geste
- Rythme et sons
- Vers le multiple
Une nouvelle collaborations est prévue avec l*iMAL à la mi octobre : workshop "Echo" Un troisième atelier est planifié pour début novembre : "Motifs en cascades" début novembre à la Green Fabric.
En fonction du retour de la comission sur ce dossier, nous nous préparons à l'activation de ce programme.